Ô Capitaine, mon Capitaine

Publié le par Nafanole

Il faut parfois s’imaginer un terrain de rugby comme un pâturage sur lequel plus d’une quarantaine de bourrins va s’envoyer dans le museau pendant 80 minutes. Souvent ça triche, ça beugle, ça se met à la faute, ça s’engueule, bref ça ressemble beaucoup trop souvent à rien. Il est donc nécessaire pour chaque équipe de trouver une sorte de berger qui saura remettre de l’ordre dans le troupeau lorsque la situation l’exige.

 

Cette responsabilité revient au Capitaine et indirectement aux entraineurs qui l’ont élu au préalable pour guider le collectif dans les moments les plus délicats. Mais si la condition principale d’un Capitaine reste d’avoir un minimum de charisme, nous allons voir que les méthodes utilisées ne sont pas toujours identiques selon les profils.

 

Ayant dépassé la trentaine depuis de nombreuses années, le « Vieux Con » comme nous le nommerons est conscient de ses limites physiques… Son accélération est devenue une parodie de ce qu’elle était et à chaque contact rugueux, se relever devient toujours plus difficile. Mais en ayant endossé le statut de Capitaine, il a également signé un contrat avec le collectif, celui de ne rien lâcher pendant une saison. Pour palier ses carences physiques le Vieux Con gueule, et pas qu’un peu… En réalité son rôle de joueur en devient même dérisoire, la plus belle action de son match reste l’impact que va laisser son discours dans les vestiaires, n’hésitant pas à coller des tartines à ses hommes pour les motiver. Dans le jeu son rôle se résume aux zones de combat, sur lesquelles gratter un ballon, tricher, envoyer quelques moulinets et autres fourchettes sont autant de raisons qui confortent son statut.

 

L’exemplarité est sans aucun doute une valeur des plus importantes pour un capitaine. Il peut arriver que la meilleure source de motivation pour un collectif soit de voir son capitaine coller des timbres tous plus offensifs les uns que les autres à un adversaire. Mais aussi gratter dans les règles des ballons les rendant alors décisifs, mettre un cul au gros lard d’en face et lorsqu’il faut envoyer une tourte, la mettre et réfléchir après… Un joueur peut faire un excellent capitaine sans faire preuve pour autant d’une aisance orale inouïe, sans se lancer dans des discours d’avant match plein d’éloquence, mais en guidant l’équipe par ses actes.

 

Il peut également arriver qu’un collectif soit composé essentiellement de joueurs lambda, le cas échéant l’entraineur est contraint d’en choisir un par défaut et là c’est pas triste. Pour peu que l’heureux élu soit mis au courant en même temps que l’équipe, il est cocasse d’observer l’évolution des traits et des couleurs de son visage. Le discours d’avant match devient alors une compilation incohérente des vidéos visibles sur la toile, du « Présentez-vous » au « Tu vas leur montrer » en passant par « C’est vos amis ça » et lorsque l’inspiration le fuit, un brave « Allez les gars… Parce que… Voilà… » est toujours très croustillant. Pendant le match à chaque décision à prendre sur les pénalités, il n’est pas rare de le voir se retourner en lançant un brave « Bon les gars on fait quoi ? » les yeux débordants de panique.

 

Au final un bon meneur d’hommes doit être maître du destin du collectif, le Capitaine de son âme, en le menant le plus loin possible dans l’effort, où le mental et le physique fusionnent afin de sublimer l’instant, immortaliser un groupe.

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